Archives de catégorie : coup de gueule

Pour un audit de l’Ehpad, il y a urgence

Ça ressemble à une lame de fond. Partout en France les personnels des Ehpad se mettent en grève, les uns après les autres. Du Nord au Sud de la France, de l’Est à l’Ouest, partout des salariés des Ehpad craquent, physiquement et moralement tant ils subissent de plein fouet le manque d’effectifs dû aux difficultés à trouver des remplaçants pour combler les absences de plus en plus nombreuses. Travail difficile qui abime les corps tout en réclamant un énorme investissement personnel. Partout la flambée du prix de l’énergie plombe les budgets, obligeant les élus locaux et les responsables des établissements à présenter des comptes en déficit. A quoi s’est ajouté une réforme récente de la fonction territoriale favorable aux personnels – et c’est heureux – mais pénalisante pour les comptes. « Pour combler le trou, a déclaré le maire de Groix lors du dernier conseil municipal, il faudrait augmenter la contribution des résidents de 580 euros par mois. » Impossible, quand le tarif moyen dépasse les 2000 euros mensuels. 

Et puis il y a l’Ehpad de Groix, « un privilège pour une commune de 2300 habitants » ainsi qu’aime à le rappeler le Maire de notre commune tout en exerçant une sorte de chantage sur le thème « ne vous plaignez pas au risque de faire disparaître l’établissement ». Mais pour le personnel, à les entendre, travailler dans cet l’établissement n’a rien d’un privilège. Pour mémoire, rappelons que dans les communes qui ont un CCAS (Conseil Communal d’action sociale) – ce qui est le cas à Groix – l’Ehpad est géré par le CCAS disposant d’un conseil d’administration présidé par le Maire de la commune. Autrement dit, le maire est un patron qui délégue la direction de l’établissement à un(e) directeur (trice). 

« On n’a pas le temps de lever tout le monde avant midi »

Et c’est ainsi que le 15 février 2024, une grève d’une journée a été déclenchée, libérant les plaintes comme déborde le lait sur le feu, d’un coup. Il fallait écouter ce jour-là les infirmières et les aides-soignantes qui se succédaient au micro décrire leur quotidien : « le sous-effectif conduit à la maltraitance des résidents» alerte une aide-soignante expliquant qu’à six personnes c’est tenable mais pas à quatre comme c’est le cas depuis le mois d’août.  « Certains jours nous n’avons pas le temps de lever tout le monde, on a même vu un résident rester dans son lit pendant quatre jours » déplore une autre.  « Les remplaçants sont difficiles à trouver faute de logements sur l’île ; et quand on en trouve, soit les candidats sont mal formés ou bien ils ne restent pas tant la gestion du personnel ici nous met sous pression ».  « On a même l’impression que la direction ne fait pas le nécessaire pour trouver du monde » ajoute une autre . Quant à la municipalité, elle n’arrange rien : « il n’y pas longtemps, rappelle une autre soignante croisée au cours de la manifestation, un couple dont le mari, compétent, voulait travailler à l’Ephad, s’est vu refuser par la mairie l’autorisation d’habiter sur leur bateau à quai au prétexte que le règlement du port l’interdit. » Une dérogation aurait pu être accordée compte tenu de l’urgence de la situation. « Nous n’avons aucun soutien de notre hiérarchie » affirme l’autre ; « le service s’est tellement dégradé que nous sommes devenues des robots du soin. » Quant au dialogue avec la hiérarchie il semble être à côté de la plaque. Un exemple ? « Si une aide-soignante refuse un horaire – qui au passage lui a été annoncé par voie d’affichage du jour au lendemain sans concertation – elle reçoit un SMS de la direction qui la somme d’accepter.  Quel manque d’empathie ! » Certains grévistes vont jusqu’à écrire sur une pancarte lors de la manifestation du 15 février « Management toxique » sans que personne n’y trouve à redire, qu’il soit salarié ou parent de résident qui évidemment souffre de cette gestion défaillante. 

« Le personnel n’est pas tire-au-flanc« 

Il y a donc urgence. Urgence à rétablir le dialogue entre les salariés et la hiérarchie, urgence à ne pas considérer que si le taux d’absentéisme est si élevé à l’Ehpad de Groix (26% ici contre 9% dans les autres Ehpad), ça n’est pas parce que les salariés sont des tire-au-flanc, mais parce que la souffrance au travail s’est installée de manière durable et intolérable. 

Pour toutes ces raisons, les élus que nous sommes réclamons un audit tant social que financier de l’établissement pris en charge par le département qui en a la compétence en tant que bailleur de fonds au côté de l’Etat et de l’Assurance maladie. Nous avons donc mandaté nos élus au Département pour qu’ils se fassent nos porte-parole au conseil départemental. Du rapport qui en sortira devront émerger des solutions qui mettront fin à cette situation dégradée, néfaste pour les salariés comme pour les résidents.

dominique yvon, maire de Groix, grosse fatigue

Voici le texte intégral d’un communiqué de presse que nous avons transmis au journal Ouest France du 20 avril 2023, en réponses à un article rapportant des propos choquants du maire de Groix, Dominique Yvon.

« Le coup de gueule de Dominique Yvon » titre Ouest France du 20 avril. A notre tour, élus d’opposition, de pousser un coup de gueule en réponse à des propos qui indignent la population. En quelques lignes, le maire de Groix réalise un amalgame manipulateur entre les manifestants contre la retraite à 64 ans, auxquels il ajoute ceux qui portent un jugement critique contre les pistes cyclables telles qu’elles sont réalisées et les tagueurs anti-résidences secondaires. Il y inclut en outre l’opposition municipale qui remet en cause sa stratégie budgétaire privilégiant les grands projets onéreux au détriment d’actions plus ciblées et urgentes en faveur des citoyens. Ainsi, il sème la confusion pour disqualifier toute contestation. « Le 49.3 est le prétexte pour m’emmerder » dit-il en substance. Vexé par les critiques – nombreuses – qui ne sont pourtant que le produit du fonctionnement normal d’une démocratie locale, il menace d’interrompre des projets d’utilité publique votés par le Conseil municipal, comme s’il pensait devoir punir une population qui a l’outrecuidance de s’exprimer sur ce qui ne lui convient pas. Si le maire de Groix s’estime « usé » et « trop âgé pour se faire disputer » ainsi qu’il le dit lui-même, qu’il se retire et aille se reposer plutôt que d’insulter ses concitoyens en les sommant de se tenir tranquilles sous peine d’être privés d’équipements. 

La justice tranche la triste affaire de la rue du Large

Il se passe de drôles de choses à Groix, sans que la presse locale n’en rende compte. Ici, quelques jours avant Noël, on convoque à la gendarmerie une septuagénaire et un octogénaire pour leur infliger un interrogatoire musclé comme s’il s’agissait de délinquants ordinaires. Leur délit ? Avoir déplacé – il est vrai sans trop de précautions – une table de jardin, des pots de fleurs, une corde et quelques piquets en bois qui les empêchait d’emprunter l’étroite rue du Large à Locmaria. Ce qui leur a valu une plainte pour vol déposée par la propriétaire de ce bric-à-brac qui avait filmé la scène à l’aide d’une caméra de surveillance installée derrière ses fenêtres. On croit rêver : la force publique se met en branle pour quelques piquets en bois disparus… et retrouvés plus tard dans sur un terrain voisin appartenant à la personne qui a porté plainte ! 

Mais voilà, cette histoire a des racines profondes. En effet, dans le haut de cette rue qui relie la rue Tromor à celle du Liaker, se joue depuis trois ans un conflit qui est en réalité le produit d’une accumulation d’erreurs administratives. Au fil des mois, sous le regard désinvolte des autorités municipales qui n’ignoraient rien du caractère explosif de la situation, une histoire digne d’un théâtre de Guignol s’est construite. A la longue, elle a fini par empoisonner tout le quartier. 

Il y a trois ans donc, une habitante du haut de la rue s’est mise en tête de revendiquer la propriété d’un espace situé devant chez elle, excédée de l’occupation du lieu par trop de voitures. Problème, l’espace en question se confond avec la rue, une voie publique en réalité. Mais sûre de son bon droit, elle s’est appuyé sur un acte notarié lui attribuant une parcelle empiétant sur la rue Large. Moyennant quoi, pour marquer sa propriété, elle a purement et simplement barré la rue l’aide de palettes, empêchant les riverains de circuler d’une extrémité à l’autre de la rue pour vaquer à leurs occupations.

Le ton est très vite monté entre voisins qui ne l’entendaient pas de cette oreille. Au point qu’une plainte a été déposée suivie d’un procès lui contestant la propriété de cet espace. La justice a tranché : le bout de terrain qu’elle revendiquait ne lui appartient pas, car il est apparu qu’une erreur s’était glissée dans le cadastre lors d’un remaniement cadastral dans les années 70, erreur entérinée un peu légèrement (et même sans justification légale) par un adjoint au maire de l’époque, mais qu’aucun acte notarié n’avait confirmé. Pis encore, l’espace en question est bien une voie publique est doit donc être laissée libre à la circulation. La mémoire collective était donc fidèle, cette rue avait toujours servi à relier la rue du Tromor à celle de Liaker. 

Une barricade bloque la voie publique

Mais alors pourquoi cette habitante a-t-elle campé avec autant d’énergie sur sa position ? En réalité, parce que, prudente, en juillet 2019, elle a sollicité la mairie pour obtenir une autorisation d’ériger à cette endroit une barrière de 3 mètres de long et haute de 90 centimètres équipée d’un portillon. Ce à quoi il lui est répondu par un arrêté du l9 juillet 2019 signé d’un adjoint au maire que « compte tenu de conflit majeur avec le voisinage que le projet risque de provoquer », un « sursis à statuer » valable deux ans est prononcé. Autrement dit, l’adjoint au maire a flairé l’embrouille, et n’a provisoirement pas donné son accord.

De barrière il n’y a donc pas eu. Mais à la place, c’est une barricade qui a été érigée à l’aide de palettes. Et qui fit la mairie qui pourtant avait publié un arrêté on ne peut plus clair au regard de l’ordre public ? Rien, tolérant une barricade, malgré les protestations des riverains, pas plus après le jugement du tribunal qu’avant . Il a fallu attendre deux ans pour qu’une pétition signée de trois cents personnes issues de tous les villages de l’île s’appuyant et réclamant le libre passage atterrisse sur le bureau du maire pour que ce dernier dépêche le policier municipal accompagné des gendarmes afin de lever le barrage. Furieuse, l’habitante déboutée a réduit le passage à son strict minimum à l’aide de la fameuse table de jardin et de quelques pots de fleurs, déclenchant ainsi la mauvaise humeur de ses voisins et leur intervention un peu brutale qui a eu comme conséquence la plainte pour vol. 

Une perquisition pour un pied de table disparu

Dès le lendemain du dépôt de plainte pour vol, les gendarmes, décidemment très réactifs, ont débarqué au domicile des personnes concernées pour fouiller leur maison à la recherche d’indices matérialisant le vol, un bout de bois, un pied de chaise, qu’importe. La fouille s’est en fait déroulée sans mandat, ce que les gendarmes ont couvert en faisant signer une autorisation de fouille après la visite des lieux à des personnes âgées vulnérables sous le choc d’une telle descente de police. Bredouilles, leur chef a demandé aux deux personnes de se rendre à la gendarmerie le lendemain. Là, le grand jeu a commencé, laissant les deux « suspects » choqués et angoissés.

Les forces de l’ordre ont-elles usé de moyens proportionnés pour mener leur enquête pour un peu de mobilier malmené ? A l’évidence non. Quelles consignes ont-elles reçues de la justice à qui la plainte a été adressée pour traiter ainsi des personnes âgées et fragiles ? Mystère. Aux autorités locales de nous apporter la réponse. 

Cette histoire aurait pu tenir en quelques lignes : une erreur de transcription de cadastre suivi d’un abus de pouvoir d’un adjoint au maire ont conduit une habitante à revendiquer la propriété d’un espace qui en réalité est public. Les autorités locales interpelées flairent un possible et grave conflit de voisinage, mais n’interviennent pas face au coup de force de l’habitante. La justice tranche sans que les autorités locales ne se soucient de faire appliquer la décision. Et c’est ainsi qu’au summum de la crise des gendarmes intimident des voisins réclamant le rétablissement de leurs droits, usant de méthode peu adaptée à la situation et à l’âge des personnes concernées. Une banale histoire de voisinage ? Un fait divers clochemerlesque qui ne mériterait pas deux lignes dans un journal local? Non, un scandale de la vie communale où l’on peut barrer une voie publique pour se l’approprier sans que le maire ne s’en émeuve malgré la connaissance qu’il avait du caractère publique de la rue, ce que souligne un peu plus encore la décision de la Cour d’Appel du 24 janvier dernier confirmant le jugement de premier instance : la rue Large devra être totalement libre au plus tard à la fin du mois de février. A la date du 4 mars 2022, date à laquelle ces lignes sont écrites, elle l’est. Il fallait que ce soit dit et écrit, nous le faisons.

Reste que la spirale de tensions physiques et psychologiques dans laquelle se sont trouvés précipités les habitants de cette rue du Large est désastreuse. D’un côté, une personne sûre de son bon droit, bien que contesté par la justice, use de méthodes agressives pour intimider ses voisins, de l’autre lesdits voisins qui parfois perdent patience et font voler des noms d’oiseau et qui vivent désormais dans l’angoisse de poursuites pénales, bien qu’ils aient reçu des assurances du maire sur l’absence de suites. Voilà comment naissent les conflits de territoires. D’autres lieux sont l’objet de conflits identiques à travers l’île, produit d’un mode de vie ancestrale où la solidarité et le dialogue entre voisins étaient la règle. Pour qu’une telle triste guignolade ne se reproduise pas, nos autorités seraient bien inspirées de s’en saisir au plus vite, à la différence de ce qui s’est passé rue du Large.