Privatisation de l’Ehpad, les événements se précipitent

A la suite de la publication de notre article sur la situation à l’Ehpad et en réaction à la pétition lancée par le collectif Groix 2026-Nouveau Cap que les élus de l’opposition soutiennent, les événements se précipitent.

Lundi après-midi la Maire, Marie-Françoise Roger a convoqué l’auteur de l’article en ces termes :

« Bonjour M JAILLETTE,

Pour faire suite à votre article évoquant l’existence d’un projet alternatif pour l’EHPAD, Madame la Maire vous convie à en exposer les détails devant les membres du Conseil d’administration du CCAS, le vendredi 1er août à 11 heures.

 Les membres du Conseil d’administration recevront une invitation dès que vous aurez confirmé votre disponibilité pour cet échange.

 Cordialement. »

Voici notre réponse :

Madame la Maire, Marie Françoise Roger

J’ai bien reçu le courriel du 28 juillet dernier m’invitant à venir échanger le 1er août avec le CA du CCAS et présenter les détails d’un plan alternatif à la privatisation de l’Ehpad de Groix.

Malheureusement cet échange tel que vous le concevez ne pourra pas avoir lieu.

 Pour plusieurs raisons.

1 – Depuis le mois de septembre 2024, soit presque un an, nous, élus de l’opposition, interpelons le maire Dominique Yvon sur la situation de l’Ehpad en lui proposant d’engager une concertation avec les acteurs directs de l’établissement. C’est dans cet esprit que nous avons proposé un audit social et financier de l’établissement. Monsieur le maire a commandé un audit social sans retenir la partie financière. Concernant la concertation, rien n’a été retenu. Il nous a fallu prendre l’initiative d’une enquête journalistique retentissante dont je me suis chargé en tant que professionnel (Carte de presse 54131) pour que vous consentiez à un début de concertation.

Le fonctionnement de notre équipe n’est pas le même que le vôtre : il est collectif et basé sur le débat, ce qui prend du temps. Notre travail d’échange et d’écoute des différents usagers et personnels de l’EHPAD n’est pas terminé. Moyennant quoi les quatre jours qui séparent votre convocation et le 1er août sont insuffisants pour que le l’audition soit profitable à tous.

2 – La pétition initiée par le collectif Nouveau Cap Groix 2026 que nous soutenons demande une concertation associant des représentants du personnel, des représentants des résidents, du Conseil municipal, de la sous-préfecture du Conseil de vie social de l’ARS et des professionnels de santé de Groix. Je ne participerai – ainsi que mes collègues – à un débat que lorsque que toutes ces instances pourront être réunies et ce pas avant le mois de septembre, la saison estivale ne permettant pas d’envisager un rendez-vous plus tôt.

3 – Pour que toutes les conditions soient réunies pour une concertation réelle et loyale, nous vous demandons d’arrêter le plus rapidement possible ce que qui peut être qualifié de préparation à la privatisation en l’occurrence la dénaturation de certains postes à l’Ehpad et la non titularisation de postes visés par une externalisation de services selon les futurs projets d’un repreneur privé, qu’il soit mutualiste ou autre. Le plan alternatif à la privatisation ne pourra être proposé qu’à la condition d’un état des lieux sincère et stable des ressources humaines et financières.

4 – Vous me demandez de venir présenter les détails d’un plan de redressement de l’Ehpad conçu en interne. Nous pensons que la meilleure manière d’obtenir des détails sur ce plan serait d’interroger le service des ressources humaines. Selon nos informations, ce plan a été présenté et approuvé par la directrice de l’Ehpad. Je vous suggère de vous rapprocher de cette dernière afin d’en avoir connaissance et pour comprendre pourquoi il a été stoppé net après la communication de l’audit.

En outre, pour que toutes les conditions soient réunies pour une concertation sereine, nous vous demandons de n’envisager aucune sanction à l’égard des sources qui nous ont informé et qui ont agi en lanceurs d’alertes, statut reconnu par la loi.

Pour nous, ces quatre raisons sont autant de conditions devant être réunies pour qu’un débat ait lieu dans l’intérêt de nos  ainés et de leur famille. Loin de nous l’idée de retenir des informations ou d’éviter d’échapper à un débat précis et circonstancié. Rendez-vous donc à l’automne.

Cordialement

Une réponse claire et circonstanciée. Malgré le caractère de notre réponse, la Maire a laissé entendre dans Ouest France du 31/07 que nous nous défilions : « Élue en mai pour succéder à Dominique Yvon, maire de 1989 à 2001 et de 2014 à 2025, Marie-Françoise Roger s’agace. Le plan de sauvetage évoqué par Jean-Claude Jaillette ? « Nous n’en avons jamais entendu parler. D’ailleurs, nous avons invité monsieur Jaillette à venir nous l’exposer vendredi (1er août 2025) en mairie devant le CCAS, qui est l’entité qui gère l’Ehpad. Mais, je ne suis pas certaine qu’il vienne », raille l’édile. »

A la lumière de notre réponse à la convocation de Mme la maire, chacun jugera que nous ne nous défilons pas, bien au contraire.

 

Privatisation de l’Ehpad. Comment la mairie a étouffé un projet alternatif

Aussi incroyable que cela puisse paraître, au regard des enjeux économiques, sociaux et de cohésion de la population locale, le projet de privatisation de l’Ehpad est, selon des sources internes à l’établissement, le produit d’un caprice de l’ancien maire à la fin novembre 2024. Oui, un caprice, c’est-à-dire une décision prise un beau matin sans crier gare, stoppant net un plan de sauvetage engagé en interne. Ce plan, a été élaboré au lendemain d’une grève des soignantes, par un service de ressources humaines, interne à l’Ephad, compétent et expérimenté dans la gestion de ce type d’établissement. 

Un caprice né, toujours selon nos sources, d’une vexation provoquée par une grève d’une journée en février 2024, suivie d’une manifestation devant la mairie que le maire pensait pouvoir régler par une discussion dans son bureau selon sa méthode habituelle de résolution des conflits et que les grévistes avaient refusée. Quelques mois plus tard, un audit social est venu confirmer l’état dégradé du management et son impact sur la santé du personnel, nourrissant un peu plus encore le découragement de l’édile.

Un caprice encore quand une décision de cette importance a été prise sans sonder pas plus le réseau des aides à domicle que les instances représentatives de la population comme le Conseil municipal, le Centre communal d’Action Social (CCAS) et le Conseil de la Vie Sociale (CVS), pourtant capables de mobiliser des compétences locales pour tenter de trouver une solution.

Un caprice enfin qui ne donne pas dans la légèreté puisque dès à présent, et avant même toute délibération réglementaire, un ménage social et financier est réalisé par l’actuelle autorité, mairie et direction, main dans la main, afin de rendre la situation acceptable par le repreneur, en l’occurrence le groupe VYV Mutualité. Sans nos interventions d’élus d’opposition à plusieurs reprises lors des conseils municipaux, le processus se serait déroulé discrètement jusqu’à une mise devant le fait accompli des conseillers municipaux assortie d’un chantage « c’est ça ou la fermeture ». Comment résister à un tel dilemme organisé dans la précipitation ?

Non à la privatisation de l’Ehpad

Nous l’avons déjà formulé nous ne sommes pas favorables à la privatisation tant que des solutions locales et en interne n’ont pas été tentées. Il s’agirait, d’une part de redresser la situation financière et d’autre part d’enrayer l’absentéisme dont la cause est plutôt à chercher dans les conditions de travail catastrophiques plutôt que dans la désinvolture des personnels comme le laisse entendre l’actuelle maire. 

Pourquoi tant de hâte ? Pour nous, il s’agit de construire une alternative tout en appelant la population à soutenir sa maison de retraite publique. Il y va de la prise en compte de notre situation d’iliens, des prestations aux résidents de l’emploi local, des débouchés pour les productions locales comme du contrôle de l’avenir de l’établissement. 

Pour consolider notre position nous avons enquêté, au cœur du réacteur mais aussi à l’extérieur de l’Ehpad. Et là, surprise, nous avons découvert l’existence de ce plan de sauvetage. Le plan, à la fois ambitieux, professionnel et raisonnable répondait à la volonté de maintenir l’Ehpad dans le giron de la commune. Il aurait malgré tout nécessité des aides communales  voire départementales, ni plus ni moins que bien d’autres Ehpad publics, en concertation avec l’ARS. Une action commune avec les maires concernés par le déficit de leur Ehpad aurait été la bienvenue. A Groix rien de tel, ce qui renforce encore l’impression de caprice du maire.

Un projet bouclé pour la fin de l’année        

Partageant les mêmes conclusions que l’audit social réalisé à la suite de la grève et inspiré des techniques éprouvées de gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences, le plan visait à consolider l’équipe des professionnels tout en réduisant les coûts. Il proposait de titulariser 9 postes dans le but d’améliorer les conditions de travail en réduisant la précarité induite par le recours aux CDD. Il prévoyait également de revoir les rémunérations en tenant compte des responsabilités et de l’implication dans le travail. Une politique volontariste d’accès au logement était engagée en constatant que certains salariés avec enfants vivaient chez leurs parents ou en caravane et qu’en trois ans, aucune demande de logement social n’avait été satisfaite. Le plan incitait également un à recours uniquement à des CDD plutôt qu’à l’interim, ruineux.

Pourquoi le maire et sa majorité n’ont-ils jamais fait état de ce plan devant le Conseil municipal en réponse à nos demandes insistantes depuis la fin 2024 sur la recherche de solutions locales, ou devant l’instance concernée au premier chef, le CCAS ? Pour masquer l’alternative et se mettre dans l’obligation d’appeler la Mutualité au secours? Au lieu de cela un projet de privatisation a été mis en route comme seule issue possible et confirmé par le maire le 20 juin dernier devant le CVS. Le Conseil de Vie Sociale est une structure regroupant des représentants des familles, du personnel, des bénévoles ainsi que la présidente du CCAS, Marie-Françoise Roger, la nouvelle Maire. Moyennant quoi les 9 titularisations programmées depuis octobre 2024 ont été suspendues ou remises en cause et les personnels concernés sommés d’accepter un CDD précaire. A regarder de près les emplois en danger tels qu’indiqués dans l’état des effectifs distribué au Conseil d’administration du CCAS du 13 mai dernier, on comprend très vite que la manœuvre autour des titularisations prépare l’arrivée de la Mutualité. Par exemple : 4 postes à la cuisine sont concernés auquel s’ajoute un autre en retraite progressive. Décryptage : la cuisine sera externalisée ce que propose le repreneur dans sa logique de mutualisation des servicesLes repas arriveront par camionnette réfrigerée depuis le continent, en barquettes, et rechauffés sur place. Finie la cuisine locale et ses odeurs qui dès le milieu de la matinée stimulent les sens des pensionnaires. Al’heure où la France est engagée dans une démarche d’amélioration continue avec le label « Services Publics + », à Groix, le poste de l’assistante des ressources humaines est d’ores et déjà vidé de sa substance, ce qui est illégal. En effet, la gestion des payes, part importante de sa fonction, seront externalisées  à compter du 1er janvier 2026. . On voudrait se débarrasser d’un service en montrant la direction de la porte qu’on ne s’y prendrait pas autrement.

Voilà l’état de la situation. Devant le CVS, la mairie a affirmé vouloir trouver un accord avec VYV d’ici la fin de l’année. Nous sommes convaincus qu’à Groix particulièrement l’Ehpad doit rester public, quitte à ce que la municipalité et le département mettent la main à la poche pour équilibrer les comptes.

Signer la pétition lancéee par Groix 2026 Nouveau Cap


Afin de tenter d’interrompre le processus de préparation à la privatisation nous soutenons une pétition initié par Groix 2026 nouveau Cap que nous encourageons tous les habitants de l’île attachés à leur Ehpad à signer.

https://www.change.org/p/non-%C3%A0-la-privatisation-de-l-ehpad-de-groix-morbihan ?

Ainsi, nous montreront qu’il est possible d’échapper à ce piège dans lequel la mairie veut nous enfermer où il faudrait choisir entre « privatiser, fermer ou augmenter les tarifs de 400 euros » comme l’affirmait Dominique Yvon, encore maire, dans le Télégramme du 20 octobre 2024. Une alternative existe, il est encore temps d’y travailler.